Si la stratégie de vente de vos produits ou services vous semble confus, il est temps de changer de regard !

Cette semaine, les deux géants américains du web s’affrontent via leurs objets connectés, Google Home et Amazon Echo. Une guerre sans merci : la société de Jeff Bezos ne veut pas commercialiser les enceintes de Google. Lequel a – en guise de représailles – coupé l’accès à YouTube pour les enceintes connectées d’Amazon. Enfin Google a arrêté l’approvisionnement de Nest aux e-commerçant présents sur Amazon pour assécher le marché.

Par ailleurs, Amazon passe à la vitesse supérieure sur le marché de la sécurité domestique et a racheté le 28 février pour 1,1 Milliard de dollars de la société Ring fournisseur de sonnettes connectées et dans son article du 6 mars, le journal La Tribune indique la volonté d’Amazon de proposer des cartes VISA et de se lancer dans la banque.

Il semble donc que les GAFAs aient très bien compris la puissance que les objets intelligents offrent à celui qui les maîtrise et se livrent une guerre pour prendre des positions dominantes dans la délivrance des expériences client de demain. En même temps au mobile World Congress à Barcelone, le constructeur de voiture SEAT annonce avec beaucoup de joie qu’il a intégré Alexia d’Amazon dans ses voitures pour délivrer plus d’expériences à ses clients via l’assistant vocal.

Je doute que ce soit SEAT qui profite de la création de valeur.

Le fossé se creuse entre les entreprises qui raisonnent avec les schémas classiques et les entreprises qui changent complètement de paradigme.

Les business models traditionnels ne conviennent plus dans un monde connecté. Nous vivons une rupture technologique… Il ne faut pas imaginer que les vielles recettes vont fonctionner. Il est temps de changer de regard et de faire évoluer les approches.

Un modèle économique « qui rapporte » est un modèle économique qui se situe à l’endroit précis d’un échange à forte valeur ajoutée. Autrefois cet échange de valeur était bien circonscrit dans le temps, dans l’espace, et dans ses moyens d’échange. Ce qui laissait la part belle à la segmentation des clients et à l’analyse des comportements dans des « parcours client » bien établis.

Or, dans un monde d’objets connectés, tout objet peut se mettre à délivrer une valeur d’usage. Il n’y a donc plus un ou quelques parcours clients bien définis mais d’innombrables parcours qu’il devient impossible d’analyser avec les méthodes utilisées précédemment.

« Quand une personne est connectée sa vie change,  quand tout est connecté c’est le monde qui change. » Hans Vestberg, President and CEO, Ericsson

Prenons l’exemple de l’achat d’une botte de carottes sur le marché. Avant l’ère digitale, je devais me rendre physiquement sur la place du marché en face de l’église au stand du primeur, le samedi matin avant 13h00 avec du cash s’il vous plait ! pour acheter ma botte de carottes. A cette époque la vie était simple pour le primeur.

En 2000, chez moi dans mon bureau depuis un ordinateur je pouvais aux horaires d’ouverture commander en ligne et payer par paypal ou VISA ma botte de carottes livrée sous 3 jours.

Le smartphone en 2007 m’offre la possibilité de consommer de partout (ou presque) et à n’importe quelle heure.

Aujourd’hui, si nous ajoutons à cela la capacité de n’importe quel objet frigidaire, balance connectée, de commander à ma place et de payer en bitcoin… Le primeur en 2018 a de quoi s’arracher les cheveux pour être présent à chaque point d’échange de valeur.

Si nous sommes d’accord pour affirmer que c’est dans l’échange que se produit la transmission de la valeur, alors les entreprises doivent se positionner en intermédiaire entre celui qui exprime un besoin et celui qui le délivre… sous peine de se faire désintermédier.

Le parcours client une notion obsolète ?

Les technologies offrent au consom-acteur toujours plus de flexibilité pour satisfaire ses envies de consommation. Le fameux parcours client autrefois unique et simple peut désormais passer par de multiples chemins dépendant du contexte dans lequel il se trouve et des possibilités qui lui sont offertes. Et c’est combinatoire… autant dire que la notion de parcours client devient dépassée car de plus en plus délicate à appréhender dans un monde où l’on multiplie les interactions possibles.

Plus sérieusement… Le client (celui qui achète) devient de plus en plus difficile à catégoriser et à suivre. Mettons-nous maintenant dans un exemple de vente de service en B2B dans lequel l’usager, le donneur d’ordre, le payeur, le bénéficiaire sont des personnes différentes, et que leurs besoins varient dans le temps et dessiner le processus d’achat devient impossible.

Plutôt que de partir de ce que l’entreprise délivre et d’analyser comment pousser cette valeur aux clients, les entreprises doivent aujourd’hui plus que jamais s’attacher à délivrer une expérience client riche de sens et de valeur en considérant toutes les industries en jeu et pas uniquement la leur. L’exercice consiste à comprendre et se positionner en intermédiaire entre des besoins client et un écosystème capable de répondre à cette demande. Les objets que nous manipulons tous les jours ont cette capacité-là.

Les nouveaux business models ressemblent donc plutôt à du pointillisme. Chaque point étant un maillon d’échange de valeur. Au départ, on ne comprend pas le rapport entre ces points, puis petit à petit, ils constituent l’ensemble des éléments capable de délivrer une expérience client nouvelle et créatrice de valeur.

Les sonnettes connectées d’Amazon à priori très éloignées de leurs cœurs de métiers la plateforme logistique, la vente de capacité informatique à la demande (AWS)… permettent en réalité d’accomplir le rêve de notre primeur… vous déposer votre botte de carottes dans votre frigidaire.

Côme Pinchart, Associé PremiumPeers